Chasse aux chômeurs: Un bon accompagnement vaut toujours mieux qu´un contrôle stérile

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« On veut donner un signal aux chômeurs : leur faire comprendre que l’allocation est un droit, mais que ce droit est conditionné par l’obligation de chercher un emploi ou suivre une formation. Mieux vaut intervenir de manière précoce qu’attendre que les chômeurs se soient enlisés, découragés ». La tirade est de Frank Vandenbroucke, alors ministre de l’Emploi dans le gouvernement Verhofstadt I, interrogé par Le Soir en octobre 2003[1]. A ce moment, la majorité violette avance une série de réformes pour maintenir en équilibre le budget fédéral.

Genèse d’une réforme âprement discutée

Et Vandenbroucke va marcher sur des œufs. Notamment vis-à-vis des socialistes francophones : en avril 2002, Johan Vande Lanotte (SP.a) avait fait passer une réforme du minimex (depuis lors appelé revenu d’intégration) qui prévoyait un « contrat d’intégration » entre le CPAS et le bénéficiaire de l’aide sociale[2]. Si le PS avait fini par caner, c’était après de longs débats et beaucoup de points contestés. Un autre dossier nourrira encore la tension entre les socialistes du Nord et du Sud du pays : les titres-services. En novembre 2003, Vandenbroucke et Onkelinx (vice-première ministre) vont se déchirer violemment sur le sujet, et il faudra encore négocier de longues heures avant d’aboutir à un accord qui satisfasse les parties. Et encore… « A priori, nous appliquerons l’accord tel qu’il est, mais il faudra également voir comment évolue le dossier, et être attentif aux dérapages » commentera dans la presse Philippe Courard (PS), alors ministre wallon des Affaires intérieures [3] .

Lors d’un superconseil des ministres (marque de fabrique de Verhofstadt) programmé à la mi-janvier 2004, la réforme du chômage, déposée sur la table par Vandenbroucke, passe finalement la rampe sans trop de difficultés. Le PS n’y trouvera rien à redire, ou presque. Peut-être, jugeront certains analystes, pour éviter « d’entretenir l’image d’une Wallonie trop laxiste »[4]. La contestation vient donc des syndicats qui s’époumonent à rappeler que le problème ne vient pas des chômeurs, mais de la pénurie d’emplois. Dans un communiqué diffusé le 20 janvier, la FGTB s’indigne de la décision gouvernementale : « L’inquiétude que ces mesures provoquent parmi les chômeurs, particulièrement parmi les plus âgés, dont les multiples recherches d’emploi se sont révélées vaines, est intolérable »[5].

Une traque aux chômeurs : voilà à quoi s’attendent les syndicats. Vandenbroucke les rencontre rapidement, et tente de rassurer : « Nous tiendrons compte des critères précis afin de déterminer le groupe cible qui sera contrôlé »[6]. Le ministre de tutelle entend donc laisser en paix les chômeurs âgés, en incapacité de travail, ceux qui peuvent justifier une longue carrière, ceux qui recherchent activement un emploi, …

En outre, des efforts politiques seront également faits pour augmenter le nombre d’emplois vacants, de formations ou encore de stages, et le chômeur convoqué pourra se faire accompagner par une personne, un délégué syndical par exemple.

Bien, mais pas assez. La semaine sera encore riche en réunions pour que l’accord entre gouvernement et partenaires sociaux soit signé. Les syndicats obtiendront ainsi la certitude que les Régions auront le temps nécessaire pour offrir un accompagnement ou une formation au chômeur avant toute convocation pour contrôle. Quant aux critères pour délimiter les groupes cibles, ils sont modifiés : on ne parle plus de région ou de durée de chômage, mais de l’âge du chômeur. Les plus jeunes (moins de 25 ans) étant convoqués plus rapidement pour espérer les faire rejoindre le marché du travail le plus vite possible. Enfin, il est prévu de créer une banque de données partagée entre l’Onem et les organismes de placement que sont le Forem (Région wallonne), l’Orbem – désormais Actiris (Bruxelles) et le VDAB (Région flamande).

Le consensus était indispensable pour Vandenbroucke, puisque le comité de gestion de l’Onem devait approuver le plan. Et on y retrouve les syndicats…

Le contrôle de disponibilité des chômeurs en pratique

Il existe globalement deux types d’approche pour s’occuper des chômeurs : le modèle anglo-saxon et le modèle scandinave. Dans le premier cas, l’idéologie prévalant affirme que l’intégration des gens doit se faire par le travail, même si ce travail est pénible ou précaire : l’élévation sociale passe donc par le travail. Un discours qu’on retrouve sans problème aux Etats-Unis ou en Angleterre. L’alternative est à chercher dans les pays scandinaves où il existe une démarche d’accompagnement et de prise en charge dans une cohérence sociétale, quel que soit le niveau ou le milieu de vie : celui qui perd son boulot touche au début 90% de son salaire, les femmes sont encouragées à travailler grâce à des facilités en ce qui concerne les crèches ou les temps partiels, … mais très vite, ce modèle est assimilé à une société hypercontrôlée.

Vandenbroucke aurait bien voulu imposer le premier modèle. Devant la résistance syndicale, il va finalement tendre vers le second : le contrôle de disponibilité des chômeurs en Belgique se situe donc à mi-chemin.

Credo central : celui qui peut prétendre à une indemnité de chômage doit prouver qu’il recherche activement un emploi.

Qui est concerné ? Les chômeurs complets inscrits comme demandeurs d’emploi qui comptent 15 mois de chômage, s’ils ont moins de 25 ans, et 21 mois s’ils ont 25 ans et plus. Tous les chômeurs n’ont pas été contrôlés de suite : la réforme s’est progressivement étendue des plus jeunes vers les plus vieux jusqu’en 2007. Il existe cependant plusieurs exceptions qui dispensent certaines catégories de chômeurs[7].

Le premier entretien. Une convocation est envoyée par l’Onem par courrier ordinaire : il doit se passer trois mois minimum entre l’envoi et l’entretien. Lors de celui-ci, le chômeur doit évidemment être présent, et peut se faire accompagner (par un délégué syndical par exemple). Il lui est demandé de dresser le bilan des efforts consentis pour s’intégrer dans le marché du travail, essentiellement endéans les 12 mois qui précèdent l’entretien. Ce sont des agents spécifiquement engagés par l’Onem qui mènent les débats : ils répondent au doux nom de « facilitateur ».

Comment prouver une recherche active ? En fournissant copie des CV envoyés, des réponses à des offres d’emploi parues dans la presse, ou sur internet, la preuve de contacts avec les services de placement de l’Onem, etc. De leur côté, les organismes de placement (le Forem en Wallonie) doivent également transmettre des données à l’Onem (formations suivies, actions d’accompagnement, …).

A l’issue du premier entretien. L’Onem est convaincu que le chômeur a activement recherché du travail : il est « tranquille » pour 16 mois au moins et recevra une convocation au minimum 6 mois avant un nouvel entretien. S’il n’a pas convaincu, un contrat devra être signé entre les deux parties : l’accord comprendra les efforts à accomplir, avec l’aide de l’organisme de placement, en fonction de la situation particulière de chaque demandeur. Une évaluation des progrès sera réalisée, après quatre mois au minimum. Si le chômeur refuse de signer le contrat, il verra tout ou partie de ses allocations suspendues pour quatre mois. A noter que s’il n’est tout simplement pas venu à l’entretien, il sera convoqué à nouveau, cette fois par lettre recommandée : s’il est encore absent, ses allocations seront purement suspendues.

Le deuxième entretien. Dans le cas où le chômeur a signé un contrat, il est évalué : positivement, il ne sera reconvoqué que 12 mois plus tard au minimum (avec courrier envoyé 6 mois avant) ; négativement, un nouvel accord – plus contraignant – est proposé : c’est sa dernière chance pour conserver ses droits aux allocations. En signe d’avertissement, le chômeur cohabitant sera privé de ses allocations durant quatre mois, et le chômeur isolé ou chef de ménage les verra réduites au niveau du revenu d’intégration. Quant aux bénéficiaires d’allocations d’attente[8], ils voient celles-ci suspendues durant quatre mois quelle que soit leur situation familiale.

Deuxième contrat. Si le chômeur a signé un deuxième contrat, il est convoqué une troisième fois. S’il donne satisfaction, pas de nouvel entretien avant 12 mois au moins (avec courrier envoyé 6 mois avant). Sinon, le chômeur cohabitant sera directement privé de ses allocations, alors que le chômeur isolé ou chef de ménage les verra réduites au niveau du revenu d’intégration durant six mois, avant d’être totalement supprimées. Les bénéficiaires d’attente voient leur droit supprimé quelle que soit leur situation familiale.

Le rôle du Forem

Comme nous l’avons écrit ci-dessus, la FGTB s’est battue pour que les organismes de placement jouent un rôle actif dans l’accompagnement des chômeurs. Situation finalement kafkaïenne puisque d’un côté, l’Onem (fédéral) sanctionne alors que de l’autre, le Forem (régional) accompagne… et s’il le fait mal, c’est de toute façon le chômeur qui trinque.

Il est donc vivement conseillé au chômeur de prendre contact avec le Forem, de répondre à ses invitations, de fréquenter les « libres-services » de l’organisme, de surfer sur son site web, etc.

En prenant connaissance des missions dévolues au Forem[9], on apprend que l’accompagnement à la recherche d’emploi, à la formation ou la validation des compétences font partie de son core business. Qu’apporte donc la réforme du contrôle des chômeurs ? Rien de nouveau, si ce n’est l’intégration du concept dans le contrat de gestion 2006-2011[10].

Exclu… et puis après ?

L’exclusion du chômage, qu’elle se justifie ou non, est un véritable drame pour la personne. Elle a également des conséquences importantes sur la collectivité, ce qu’on oublie de dire trop souvent…

Un chômeur reçoit des allocations de l’Onem : c’est donc le fédéral qui prend en charge le coût. S’il est rayé des listes du chômage, la seule solution pour survivre est de demander l’aide du CPAS, et donc de la commune. Voilà donc un poids financier nouveau supporté par les localités, et indirectement la Région. Or, la situation n’est pas exceptionnelle : on estime que 38% des chômeurs sanctionnés sont pris en charge par les CPAS[11]. Rappelons qu’il existe deux types de sanction : temporaire (généralement moins de quatre mois) ou définitive (ce dernier type représente en moyenne un tiers des sanctions).

En pratique, en 2009, l’Onem a ainsi viré de ses listings 20 chômeurs par jour, soit un total de 3.147 personnes[12]. Si on ventile ce chiffre au niveau régional, la Wallonie a exclu trois plus de chômeurs que la Flandre (2.011, pour 760 en Flandre et 376 à Bruxelles). 3.928 personnes ont également vu leurs allocations suspendues temporairement. En cinq ans, c’est ainsi 30.539 chômeurs qui ont été sanctionnés, et 11.275 qui ont été exclus.

Pour être complet, signalons encore que les offres d’emploi du Forem ont diminué, entre 2008 et 2009, de 20%. Et que le chômage économique touchait 50.000 Wallons en 2008. Et cela ne risque pas de s’arranger. La crise a fait des dégâts dont on ignore encore le tribut définitif.

« Arrêtez cette ineptie ! », tonne la FGTB wallonne

En octobre 2009, la FGTB Wallonne envoie un courrier à tous les présidents de CPAS et aux collèges des Bourgmestre et échevins de Wallonie afin qu’ils se prononcent en faveur d’un moratoire sur la « chasse aux chômeurs » qui engendre donc une dépense supplémentaire non négligeable pour les pouvoirs locaux. Une motion est proposée à la signature :

La crise économique actuelle ne cesse de provoquer du chômage économique, des restructurations et des licenciements au sein des entreprises. Elle engendre de nombreuses situations de détresse sociale : pressions sur les travailleurs en place, pertes d’emploi pour les uns, absence de perspectives pour les autres (jeunes, demandeurs d’emploi…).

Dans ce contexte difficile où l’emploi fait cruellement défaut – un emploi convenable disponible en moyenne pour vingt-cinq demandeurs d’emploi, le plan fédéral d’accompagnement des demandeurs d’emploi doit évoluer fondamentalement, en commençant par une suppression du dispositif de contrôle de la disponibilité des chômeurs tel qu’il est pratiqué aujourd’hui par l’ONEm (il a montré qu’il était inutile, coûteux, arbitraire et qu’il excluait davantage les plus démunis) et par un réinvestissement des moyens économisés dans l’accompagnement des demandeurs d’emploi et dans le développement de nouvelles initiatives visant à favoriser la création d’emplois de qualité.

Au-delà des conséquences sociales désastreuses, les nombreuses exclusions provoquées par ce dispositif ne sont pas sans impact financier pour les communes puisque ce sont les CPAS qui assument en quelque sorte les conséquences de la politique fédérale. Fin 2008, 38% des personnes sanctionnées (= exclues définitivement ou suspendues) par l’ONEm sont prises en charge par les CPAS[13].

Cette situation est intenable à terme, tant socialement pour les personnes que sur le plan budgétaire pour les communes.

Le Conseil communal demande donc aux autorités fédérales de changer leur fusil d’épaule. Plus que jamais, c’est contre le chômage qu’il faut lutter et non contre les chômeurs.

C’est pourquoi le Conseil communal demande au gouvernement fédéral d’appliquer un moratoire, voire de suspendre la mesure de contrôle de la disponibilité des chômeurs.

Résultat en demi-teinte : en janvier 2010, on dénombre une quarantaine de signatures issues des majorités communales, ou des conseils CPAS, ou des deux.

Pourquoi cette frilosité à signer, alors que les communes ont de plus en plus de difficultés à boucler leur budget[14] ? Il est évident que les jeux politiques sont parfois défavorables : si un parti de l’opposition dépose la motion, la majorité la rejettera avant, peut-être de la présenter sur une autre forme. D’autres n’y voient pas d’intérêt, puisque cela relève d’une matière fédérale. Argument étonnant quand on sait les implications locales…

Est-ce dire que le syndicat refuse toute prise en charge du chômeur ? « Non, évidemment », précise d’emblée Thierry Bodson, Secrétaire général de la FGTB wallonne. « Il est important que le chômeur ait affaire à un seul ‘référent’ qui lui donne toutes les informations et l’épaulera dans sa recherche d’emploi. Mais il faut aussi que ce référent ait un nombre raisonnable de dossiers à traiter ! ». Or, dans les faits, rien n’est moins sûr : un « conseiller » Forem doit gérer en moyenne entre 250 et 300 dossiers, soit plus de quatre fois plus que dans les pays scandinaves. De plus, il est évident qu’on ne s’improvise pas « facilitateur ». L’organisme public a bien mis en route des formations sur le tard, mais difficile de penser que le savoir-faire en la matière sera acquis au bout de quelques jours d’écolage…

Autre grief de la FGTB : l’énergie dépensée à la fois par l’Onem et le Forem, pour pas grand-chose. « L’accompagnement se fait après trois mois, contre un an auparavant. Les deux organismes en viennent à faire un travail redondant. Le flux d’informations qui circule de l’un à l’autre se complexifie, alors que dans le même temps, on compte pour la Belgique 700.000 chômeurs pour 60.000 offres d’emplois ! Nous prônons donc la suppression totale de ce contrôle, tout en étant partisan d’un nouvel accord de coopération entre l’Etat fédéral et les entités fédérées qui permettrait un véritable accompagnement à taille humaine ».

Le manque d’emplois… l’exemple de la région montoise est par exemple éclairant : « Le taux de chômage à Mons est en constante augmentation », commente Michel Mathy (FGTB Wallonne), « et nous n’avons peu ou pas d’entreprises de référence qui servent de moteur à l’économie locale, en favorisant par exemple la sous-traitance. Alors, que doivent faire les chômeurs ? Aller frapper aux mêmes portes tous les douze mois ? D’autant que de plus en plus d’entreprises ne prennent même plus la peine de répondre aux candidatures. Or, c’est cela qu’on demande aux chômeurs : des preuves ! ». Dès lors, quand la Ville de Mons procède à une réserve de recrutement, près de 1.800 candidats se pressent au portillon, contre 300 avant la crise…

Enfin, un autre phénomène découle de cette chasse aux chômeurs : une perte qualitative du marché du travail, puisqu’acculé, un chômeur finit par accepter un job qui demande moins de qualifications que son savoir-faire. La surqualification devient donc la norme, comme l’a démontré une étude récente de l’Université de Gand.

Le paradoxe des cellules de reconversion

Fin janvier, la FGTB wallonne a mené une opération de sensibilisation devant la cellule de reconversion de l’imprimerie Cordenons à Malmedy. « Par ce biais, nous voulons démontrer qu’un accompagnement individuel des travailleurs licenciés donne des résultats concrets : quelques mois après sa mise en route, celle-ci a déjà remis sur le marché du travail 58% des travailleurs licenciés », commente Thierry Bodson. Qui encourage donc la pratique, tout en relevant une contradiction majeure : « Il est clair que cet accompagnement social, fait principalement par les syndicats, et technique, via les conseillers du Forem, est un gage de réussite. Maintenant, ce n’est là qu’un microcosme pour une entreprise précise. Qu’en est-il des autres, notamment des PME, incapables de mettre en œuvre pareille projet de reconversion ? Parfois, une cellule de reconversion peut se mettre en place pour plusieurs sociétés en même temps, cela s’est déjà vu dans le Hainaut. Mais pour les autres ? ».

Et les politiques dans tout ça ?

Egalement interpellés par la FGTB, comment réagissent globalement les partis politiques sur le contrôle des chômeurs ?

Du côté d’Ecolo, on demande « une évaluation complète et contradictoire du plan d’activation des chômeurs » qui « doit déboucher sur une remise en cause des procédures excluantes de l’actuel plan d’accompagnement et d’un réel réinvestissement des moyens publics, dans l’accompagnement et l’insertion de ces travailleurs en puissance »[15].

Au MR, on prône « l’accompagnement individuel immédiat pour les chômeurs »[16]. Ce qui ne veut pas dire la fin des « contrôles », que du contraire.

Pour le CDH, qui a la compétence de l’Emploi tant au fédéral qu’en Région wallonne, l’Onem doit « adapter les entretiens à la crise »[17]. «Ce que dit Milquet ne veut pas dire grand-chose, puisque le contrôle dispo prévoit déjà que la situation du marché de l’emploi dans la subrégion où vous habitez sera également un élément pris en considération pour évaluer vos efforts », précise David Lannoy (FGTB Wallonne). Et attention à faire des demandes de concession excessives à la Flandre « qui veut limiter dans le temps notre système d’allocations de chômage », prévient encore la ministre. On l’a compris : on n’abandonne pas les contrôles pour autant.

Et au PS ? Elio Di Rupo est dans la droite ligne des cathos-humanistes : « Je préfère que nous ayons une discussion franche sur les faiblesses du plan d’accompagnement, mais il ne faut pas donner l’impression que demain, on rase gratis »[18]. Cependant, une voix discordante – et non des moindres, s’est fait entendre. Sur les ondes de la RTBF, le 10 février, le ministre-président wallon Rudy Demotte estime que « s’il faut réorienter les politiques d’emploi, c’est notamment sur la formation ; mais contrôler quelqu’un sur base de l’inexistant ou simplement pour des raisons bureaucratiques, c’est l’enquiquiner, ce n’est pas aider les chômeurs. Si on veut les accompagner, il faut leur donner des outils et c’est ça qui me paraît aujourd’hui la première priorité ».

Qu’en conclure ? Aucun parti francophone ne veut passer pour le « parti des chômeurs » qui favoriserait l’inaction. Et tous ont du mal à admettre officiellement que contrôler alors que les offres d’emploi sont rares, c’est une ineptie. On répond donc par une nécessité d’améliorer l’offre de formations. Bien. Sauf que… dans les budgets 2009-2010[19], le Forem ne bénéficiera d’aucune indexation par rapport à 2008, crise oblige. Comment, dans ce cas de figure, inverser la tendance ? Rappelons aussi que les entreprises, qui ont des obligations de formations dans le cadre des accords interprofessionnels, ne tiennent pas leurs engagements : selon une enquête du SPF Economie parue en 2007, elles investissaient 1,6% de leur masse salariale dans les formations, contre 1,9% de prévu.

Alors, contrôler, pour quoi faire ? Pour démontrer que le nombre d’emplois vacants est trop bas ? Pour relever les carences du Forem en matière de suivi et de moyens attribués ? Pour faire bonne figure en excluant les « moutons noirs » d’un côté pour les cloisonner dans un autre ? Absurde, n’est-il pas ?…

Antoine GRUSELIN

 


[1] In Le Soir, 22/10/03.

[2] Le Soir, 18/04/02.

[3] In L’Echo, 27/11/03.

[4] La Libre, 19/01/04.

[5] « Pour la FGTB, le sort fait aux chômeurs est inacceptable », 20/01/04.

[6] In L’Echo, 23/01/04.

[7] Voire à ce sujet la brochure « Contrôle de disponibilité des chômeurs » éditée par la FGTB et téléchargeable gratuitement (http://www.fgtb.be/PDF/fr/documents/2006/Controle_disponibilite_chomeurs.pdf)

[8] Les allocations d’attente sont des allocations de chômage obtenues sur base des études et d’un stage d’attente variant de 6 à 12 mois.

[10] « L’accompagnement des chômeurs » est formalisé comme l’un des six axes prioritaires de l’organisme. En 2008, 104.403 personnes ont été suivies dans ce cadre, selon le Rapport annuel.

[11] Chiffres de la fédération des CPAS (publication CPAS +, avril 2009).

[12] De Morgen, 13/01/10.

[13]  Chiffres de la fédération des CPAS (publication CPAS +, avril 2009). 38% est la moyenne des
5 provinces wallonnes.

[14] Outre ce nouveau coût, citons l’augmentation du prix de l’énergie, la diminution des dividendes Dexia, la surcharge due aux coûts de la police, l’enrôlement moindre de l’IPP puisque les citoyens sont aussi moins riches, etc.

[15] http://web4.ecolo.be/spip.php?article2211.

[17] Joëlle Milquet, in Sud Presse du 03/02/10.

[18] Elio Di Rupo, in Le Soir, 02/02/10.

[19] http://www.6com.be/4/dossiers_template.cfm?artID=82899.

 

 

Article: 6COM.BE

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